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Nc’nean, une aventure en pleine nature

Nc’nean Organic est un whisky bio, issu d’une orge écossaise.

À l’ouest des Highlands, face à l’île de Mull, une petite distillerie produit sans la moindre émission de carbone un single malt bio respectueux de la nature époustouflante où elle se niche, perdue dans un bout du monde entre terre et mer, entre lochs et forêts. Un whisky éthique porté par la vision de sa créatrice, Annabel Thomas.

Chaque kilomètre vous rapproche d’un paradis planqué au milieu d’un vaste nulle part. Mais, damned, qu’il se mérite, ce paradis !

Depuis Glasgow, la route suit le West Highland Way, l’un des plus spectaculaires sentiers de randonnée écossais, se faufilant le long du Loch Lomond et de la vallée de Glencoe jusqu’à Fort Williams, sur la côte ouest. Mais c’est un peu plus au sud qu’on lâche la terre ferme pour embarquer sur le ferry fendant l’un de ces bras de mer, appendice déchiqueté dont les rives des Highlands ont le secret pour égarer le voyageur. Une île ou le mainland ? On ne le sait jamais avec certitude. La traversée dure à peine 5 minutes, mais elle vous épargne une heure de route – ici, on ne compte pas en miles mais en temps.

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Les 2 voies rétrécissent en une seule, squattée par les moutons, puis le bitume finit par céder à la terre battue jusqu’à Drimnin, face à l’île de Mull. Voilà. L’éden existe, en voici bien la preuve. Mais quand même… Pourquoi diable avoir choisi ce cul-de-sac, fût-il paradisiaque, pour construire une distillerie ? Annabel Thomas éclate de rire.

« Voilà une vingtaine d’années que mon père a acheté le vaste domaine de Drimnin avec ses maisons, la ferme, le bétail, les forêts et la production de bois. Distiller du whisky, c’était la piste privilégiée pour diversifier l’activité. »

Minimiser son empreinte sur terre

Un peu moins de dix ans plus tard, Nc’nean (inspiré du nom d’une déesse gaélique, prononcer « Neuk ni-ann ») produit un superbe single malt 100% bio au sein d’une nature préservée, dans une distillerie neutre en carbone. Une distillerie de poche, l’une des plus petites d’Écosse (moins de 100 000 litres d’alcool pur par an), calibrée pour s’insérer dans son environnement en minimisant son empreinte, grâce à une chaudière biomasse alimentée aux copeaux de bois produits sur le domaine et à un étang de retenue qui récupère les eaux de pluie pour le refroidissement. Une galère sans nom pour le creuser, mais aujourd’hui les grenouilles apprécient l’effort.

Rien n’a été simple, de toute façon : acheminer du matériel lourd dans cette région où les routes ne s’aventurent pas, imaginez dix secondes ! Et le consultant pilotant le projet, Jim Swan, qui décède brutalement en 2017, avant d’avoir pu mener à terme sa mission. Cerise sur le cupcake : une épidémie mondiale au moment du lancement du single malt. Mais rembobinons quelques années en arrière.
En 2011, Annabel Thomas se met à rêver d’une autre vie. Elle n’a pas encore 30 ans, vit à Londres, consultante en gestion. Et se penche un beau jour sur le business plan paternel avant de partir faire le tour des distilleries d’Islay. Passionnant, mais…

Annabel Thomas

« Toutes ces distilleries m’ont raconté la même histoire : l’importance de la tradition et de la consistance dans la production. Aucune ne m’a parlé d’écologie et de développement durable, alors que le whisky est une industrie vorace en ressources. Toutes ont insisté sur l’importance du bois et des fûts de vieillissement mais aucune n’a développé la partie bière et fermentation, alors que le monde de la brasserie artisanale vivait une fabuleuse révolution : un single malt, c’est quand même de la bière distillée, non ? Et partout, j’ai eu le sentiment qu’on ne s’adressait qu’à des amateurs d’un certain âge. Il était forcément possible de procéder autrement. C’est à ce moment précis que le projet de mon père est devenu mon projet », résume-t-elle dans un rire.

Près de 10 ans plus tard…

En 2013, elle démissionne et passe 2 ans à lever des fonds, puis 2 autres à surveiller les travaux de construction. En 2017, les alambics commencent à distiller et en août 2020, alléluia, le premier single malt arrive sur le marché. Nc’nean Organic est un whisky bio, issu d’une orge écossaise.

« Au départ, pour des raisons écologiques, pas de goût, se défend Annabel. Mais la suite a montré que sur le plan gustatif, cela faisait une différence. »

Avec des fermentations longues (en moyenne 110 heures) et une distillation lente, les équipes produisent chaque année 5 distillats : 3 éphémères, fruits d’expérimentations avec les levures, histoire de s’amuser avec des éditions limitées ; et 2 permanents, un pour les single malts destinés à vieillir plus de 10 ans, l’autre pour les jeunes whiskies. Ce dernier démentiellement bon, au point qu’il pourrait se boire clair.

Oh, d’ailleurs il se boit clair puisque le Botanical Spirit l’utilise pour base ! Et si vous n’avez pas encore goûté cette divine alternative au gin, vous ratez un orgasme des papilles. Avouez que c’est ballot.

Les petits pas quotidiens

Si la distillerie fonctionne en carbone 0, ce n’est pas (encore) le cas des matières premières et sèches – orge, bouteilles, emballages… Mais Annabel Thomas y travaille.

La céréale bio, maltée à Inverness, provient de 2 fermes écossaises. Les flacons sont en verre recyclé à 100%, livrés sans plastiques protecteurs, et les étuis en carton sont recyclés à 90%. Les bouchons ? Liège et bois. Les cartons d’expédition ? Réutilisés pour renvoyer la marchandise. Les produits d’entretien, le café du bar, etc. ? Bio. La drêche ? Elle nourrit le bétail, tandis que les résidus de distillation fertilisent les champs. Parce que les petits gestes du quotidien doivent s’ajouter aux grandes décisions.


Nc’nean Organic (70 cl, 46%).
Prix : environ 70 €. Distribution : l’Explorateur du goût.

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